dimanche 20 mars 2016

POKER ET MEDIAS - Partie II : La stratégie opérateur


Jamais égalé dans l'utilisation de la carte 'Célébrités' auprès des médias, de Patrick Bruel en égérie historique à Kool Shen ou V. Dhorasso dans son 'Team pro' et une pléiade de Winamax Important Personnes - les WIP -, l'opérateur leader du poker hexagonal l'est également dans la stratégie de communication. Face à des médias relayant toujours les mêmes clichés, l'opérateur multiplie les opportunités de faire parler de luiet du poker. Journaliste historique de la room depuis 2009 et aujourd'hui freelance, animateur du RMC Poker Show et du Multiplex Poker, commentateur des Winamax Live Sessions, Kevin  'Harper' Noblat partage ressenti en la matière.

Il y a encore quelques mois, la room réalisait un publi-reportage via un partenariat avec 'Le Point'. Aux commandes pour l’écriture et le choix des thèmes abordés, Harper reconnaît avoir été "très libre d'écrire sur tous les sujets qui [l]'intéressaient." Mais de cette époque, le journaliste maison ne se souvient que de deux articles finalement classés un jour parmi les plus lus de la Rubrique Sport. "Côté Winamax, ils ont simplement regardé quelle visibilité cela leur apportait et ça ne devait pas être suffisant."
En Octobre 2014, Winamax créait, avec la radio éponyme, le RMC Poker Show en lieu et place de Docteur Poker, précédemment sponsorisé par Partouche, Bwin et plus récemment Pokerstars. Aux côtés de Daniel Riolo et Hugues Aubry, Benjo et Harper co-animent l’émission qui passe juste après l’After Foot, "l'émission de sport de loin la plus écoutée sur la tranche 22h-00h, ça légitime quand même pas mal le jeu", affirme Harper. 


"A chaque étape live [du WiPT] où je me déplace, au moins deux journaux locaux sont là pour immortaliser l'évènement."

Le coup de génie est le Winamax Poker Tour (WiPT) : cet événement fait le tour des médias au gré de ses étapes régionales. Si les retombées sont "difficiles à quantifier", le lancement du WiPT à la Villette a obtenu par le passé des diffusions sur M6 ou Canal+. La presse devient alors un vecteur de communication efficace, plaçant le poker au statut de jeu. Ainsi 'La Dépêche du Midi' vantait le rêve à « l’américaine » lors de l’étape de Montauban en janvier, le dijonnais 'Bien Public' se félicitait de la qualification d’un joueur local. Quant au 'Dauphiné libéré', il s’attardait sur la présence de Moundir dans un bar branché de Montélimar à l'occasion de l'épreuve locale. Plaisir, passion, rêve, people : une image bien loin de la triche, de l'addiction et du sordide que ces mêmes journaux distillaient dans le même temps (Voir Partie I). Les exemples de reprise dans la presse locale et régionale sont effectivement nombreux : Ouest France à Brest, Laval ou Nantes, Côté Toulouse, Le Républicain Lorrain, Sud Ouest, Le Courrier Picard, Bordeaux Gazette, Infos Dijon, ...


Les médias généralistes ont besoin de belles histoires, à l'instar de celle du Sassenageois Romain Goubet, vainqueur de l’étape de Montélimar, à qui le Dauphiné Libéré consacrait un article au départ de la Finale de ce WiPT. Et surtout celle de la victoire de l'amateur Cyril Georges, qualifié gratuitement lors de l'étape de Nancy, lors de ce même tournoi. C'est une aubaine pour l'équipe RP de Winamax et son agence de Relations Publiques Calliopé. Le soir même, un communiqué de presse était adressé à la presse généraliste et à la presse spécialisée. Le Parisien, Le Point et BFM TV seront malheureusement les seuls à relayer l'aventure avec le local 'Le Pays Briard', en complément des médias poker plus classiques. La vidéo réalisée une semaine plus tard ne sera, elle, reprise nulle part. A ce jour, elle totalise que 3.500 vues.

Les équipes Winamax s’étaient déjà essayées à l'exercice à l’occasion de la victoire de Rémi Castaignon lors de l’EPT Deauville 2013 : La 'Dépêche du Midi', 'Ouest France', BFM TV, Metronews Sport avaient relaté la victoire du joueur amateur. « Ce format qualification en ligne, victoire en live est évidemment plus facile à mettre en avant qu'une victoire en ligne. Question d'illustration notamment", note Harper.
Visibilité effectivement difficile à transposer sur des Events online, par exemple à l'occasion des Million Events où régulièrement des joueurs amateurs, récréatifs parviennent à réaliser de grosses performances.
Les Winamax Live Sessions pourraient-elles être une autre histoire à raconter ? "Leur volonté [ndlr : des WLS] était de créer un programme mettant en avant le cash game et la convivialité autour de la table. Créer donc un divertissement, moins axé sur la technique comme peut l'être 'Dans la tête d'un pro', plus ouvert au grand public et renouant le lien entre la communauté et le cash game", toujours selon Harper. Avec un format 52 minutes, le programme correspond aux standards de la télé. Mais au moment du tournage, il n’était question que de diffusion Web. Le commentateur des WLS s’interroge sur la capacité de la TNT pour des programmes de ce type, quand on voit que "la seule émission récurrente qui s'est positionnée en seconde (troisième ?) partie de soirée sur NRJ12, c'est plus une real-tv qu'une émission de poker."
La Maison du Bluff, programme porté par Pokerstars, n'a réellement démarré dans les médias qu'avec l'annonce de la participation d'Amaury Leveaux, comme le reconnaissait A. Laipsker sur CP Radio (émission du 08 mars). Lui avait eu droit à une seule interview dans Télé Loisirs, mais l'arrivée du médaillé olympique a motivé Le Figaro, Voici, Télé7Jours, Metronews, BFM TV à se pencher sur le programme en moins de deux jours.
Depuis le lancement de l'émission ? Une seule interview, toujours du champion sur Télé-Loisirs.fr. Le buzz médiatique n'est pas vraiment au rendez-vous.
 


Le people reste donc la meilleure carte. En 2015, l'annonce par Alexandre Dreyfus d'une Coupe du Monde du Poker est un évènement dans l'industrie, mais pas au-delà. Il faudra l'intégration de Patrick Bruel à l'équipe pour que les choses bougent. La venue de la star a finalement motivé France 2 (Stade 2, 29/03/2015), Canal+ (La Nouvelle Edition, 13/03/2015), Le Parisien à parler de poker, ainsi que France Inter, Le Monde, M6 (66 Minutes), L'Equipe 21, Télé-Loisisrs ... (source : Calliopé).

Comme Harper, espérons que "les nombreux efforts faits ici et là pour sportifier le poker vont porter leurs fruits." C’est loin d’être gagné : ces derniers jours, Jean-Jacques Mars, ex professionnel sponsorisé (MyPok), fait la une de la presse suite à son incarcération pour un trafic de stupéfiants. Le poker est bien entendu cité dans les articles reprenant l'info bien que sans rapport avec l'affaire. La meute a sauté sur l'occasion, de 'La Dépêche du Midi' à '20 Minutes', en passant par France 3 Midi Pyrénées et France TV Info. Seuls l'Equipe.fr et Europe 1 ne feront pas amalgame. 
Mieux encore, le poker est à la une à l'international grâce à ce fait divers avec 'Benin Monde Infos' ! C'est pas gagné ...

soxav

lundi 7 mars 2016

POKER & MEDIAS - Partie I : BONNE PRESSE ?


Si le poker a eu son heure de gloire, force est de constater que la place que lui octroient les organes de presse l’ont réduit à sa partie la moins flatteuse. Si le poker a souvent été associé à des faits divers ne le concernant que de loin, ces dernières semaines nous ont offert un beau panel de ce dont les médias sont capables : du pire !


Le lancement de la saison de tennis via l’Open d’Australie a été parasité par une affaire de triche à grande échelle.  La Dépêche du Midi a réussi l’exploit de mêler le poker à cette histoire, allant même jusqu’à assimiler ce jeu à la cause du problème. Peu de temps avant, BFM TV, fort de sa section dédiée au poker où l’on retrouve chaque semaine des extraits du RMC Poker Show mettait la triche à l’honneur en reprenant le scoop du Daily Mail : un croupier londonien a réussi à voler 30.000£  en subtilisant des jetons dans ses chaussettes.


Fin janvier, un obscur fait divers en provenance de Porto-Rico a fait le bonheur des journalistes émérites : Les proches d’un amateur de poker décédé se sont filmés avec le cadavre à une table de poker.


En complément des médias poker, la presse européenne y a trouvé son compte. BFM TV et France Info TV ont repris l’information, tandis que le site de la Dernière Heure la transmettait à nos amis belges. De l’autre côté de la Manche, c’est le Mirror online qui la relatait dans sa section "Infos étranges".


Mais c’est en Février que la presse a montré sa capacité d’information objective. Les auditeurs d’Europe 1 et les lecteurs de 20 Minutes apprenaient que Katya, 10 ans, aurait été jouée (et perdue) au poker par son père au fin fond de la Sibérie. Information reprise par des acteurs de la presse bien connus comme MCE (Ma Chaîne Etudiante) et au-delà de nos frontières par le suisse ‘Le Matin’. La palme revient au Dauphiné Libéré qui a titré deux fois sur l’histoire en deux jours : le 21 Février, le journal s’interrogeait « un père de famille a-t-il joué sa fille au poker ? ». Dès le lendemain, un nouvel article répondait à la question : « Un père de famille aurait joué sa fille au poker », totalisant … 119 vues. C’était bien la peine !


"Dans la presse généraliste, on est encore limité aux articles sur la fermeture des cercles ou les folies de Thomas Fabius" – Kevin ‘Harper’ Noblat


Propriétaire du quotidien, le groupe Est Bourgogne Rhône Alpes (EBRA) a immédiatement senti le filon. L’affaire est reprise mots pour mots dans les colonnes de l’Alsace, de l’Est Républicain, du Progrès, des Dernières Nouvelles d’Alsace, du Républicain Lorrain et de Vosges Matin, tous propriété du groupe. Maîtrisé à la perfection, le copier-coller au mot près fonctionne parfaitement dans les journaux locaux : les habitants de Dijon sont informés du fait divers par « Bien Public », les lecteurs de Chalon Sur Saône par le JSL, le Journal de Saône et Loire !


Dans cette approche du poker, la télévision n'est pas en reste. Souvenons-nous d'un grandiose Lundi Investigation un soir de Mai 2013 : une journaliste de la production était venue recruter des témoins sur les forums comme Clubpoker plus d'un an avant. Elle annonçait alors clairement la couleur : "Le thème du reportage porte sur les jeux d'argent et la triche", recherchant "des joueurs s'y connaissant en triche". Plus près de nous, en novembre dernier, l'émission d'Arte Vox Pop a réussi à mélanger 41 secondes d'un Elky mal à l'aise sur son imposition, 42 secondes de l'affaire Europoker et cinq minutes d'un parieur illégal dans une interview réalisée ... au Cercle Clichy Montmartre ! Sans doute avait-t-il besoin d'une table de poker et du wifi du dernier cercle de poker encore en activité pour lancer son VPN ?

Difficile de trouver bonne presse au poker en France, tellement le jeu traîne une image sulfureuse. Même quand un Français expatrié aux Etats-Unis développe un projet d’envergure, la presse n’est pas aussi réactive. A part BFM TV suite à la présence de Fabrice Soulier sur le plateau de RMC Poker Show, aucune trace de la Global Poker League d'Alexandre Dreyfus dans la presse nationale, régionale, locale, de quartier …
Lui qui souhaite "Sportify poker" a bien compris l'intérêt d'une approche différente pour médiatiser le poker.

A venir : Partie II - La stratégie opérateur avec le décryptage de Kevin 'Harper’Noblat

soxav