lundi 20 mai 2013

L’ENNEMI DU JOUEUR : LE JOUEUR … plus que Partouche !



Impossible de passer outre l’évènement de ce mois de mai, et la fermeture annoncée d’une nouvelle room. Et pas n’importe laquelle : Partouche. Au-delà de l’information d’un énième abandon sur le marché, ce sont surtout  les réactions de joueurs qui interpellent sur les forums et les blogs, tant elles montrent à quel point ils ne comprennent ni le marché ni les effets néfastes que cela impliquera nécessairement pour leur jeu à court et moyen terme, même s’ils n’étaient pas clients partouche.fr . Il faut dire que Patrick Partouche a fait preuve ces dernières années d’un indéniable talent à faire les mauvais choix. Stratégie, marketing ou communication, son groupe a pratiquement tout loupé !


Patrick Partouche stigmatise sur sa personne la rancœur de bon nombre de joueurs. A commencer par le cloisonnement du marché français dont on lui prête une bonne responsabilité. Car Patrick Partouche s’est battu comme un lion pour une offre légale dans notre pays, et surtout pour permettre à son entreprise d’y avoir la part qu’il juge mériter. Le groupe avait commencé par signer un partenariat au début des années 2000 avec Poker770, basé au Bélize (Amérique Centrale) qui valut à PP une condamnation à 12 mois avec sursis en 2007 (finalement relaxé par la Cour de Cassation en 2009). En 2006, c’est le groupe qui s’attaquait à l’état français auprès de la cour Européenne arguant de l’illégalité du monopole de PMU et Française des Jeux. En octobre 2008, n’obtenant pas gain de cause pour ses revendications sur le marché online, Partouche Interactive Gibraltar Limited voit le jour sous couvert de Play Money pour les joueurs français, qui, moins de deux mois plus tard, accèdent au jeu en Réel à l’instar des milliers de sites en .com qui inondent le marché hexagonal. Tickets live, gains à retirer en casino du groupe, la passerelle live/online vit ses premières heures. Au-delà de la personnalité de Patrick Partouche, du côté sulfureux des casinos, le groupe tente juste de naviguer entre une conjoncture défavorable pour les casinos (Contrôle d’identité obligatoire, interdiction de fumer dans les casinos, crise bancaire …), un état français peu pressé qui pense à l’époque calmer les « ardeurs casinotières » au travers de mesures stériles (organisation de jeux hors de leurs casinos) et une concurrence qu’il juge déloyale de sites illégaux sur le territoire.
Il court donc plusieurs lièvres à la fois, au travers d’un lobbying actif auprès du gouvernement  Fillon en faveur d’un marché fermé où il se voit occuper la même place prépondérante que dans celui des casinos, tout en roulant ses interlocuteurs dans la farine en lançant l’offre illégale qu’il dénigre tant.

Il fermera finalement son site quelques mois avant la date fatidique pour montrer patte blanche en vue de l’obtention d’une licence.  Mais il est déjà trop tard : la marque Partouche ne s’est pas vraiment implantée comme incontournable et n’a pas la même aura que les Winamax, Pokerstars et autres Bwin. Enfin, sa clientèle habituelle de casinos n’est pas franchement celle qui vient le plus naturellement jouer sur un ordinateur. Patrick Partouche met alors tout son poids dans la bataille pour limiter l’ouverture du poker en ligne à un minimum d’acteurs. Il semble avoir naïvement cru qu’il pourrait faire interdire l’accès au marché aux sites précédemment illégaux (parmi lesquels ... le sien !). Il pense qu’une pirouette suffira, en privilégiant les acteurs casinotiers (comme ce sera le cas pour l’ouverture du marché belge où les opérateurs online doivent être adossés à un opérateur physique). Et devra se faire une raison devant les lobbyings de ses adversaires, entre des mastodontes mondiaux (PS, Full Tilt, Party Poker, …) et un ogre français qui a bien mieux construit son image et sa stratégie. En juin 2010, le site de poker en ligne Partouche n’est juste qu’un petit site parmi tant d’autres.

Dans ce contexte, les dirigeants de Partouche vont accumuler de nouvelles erreurs stratégiques. Sur le plan de l'image notamment, avec un Eric Cantona sous contrat depuis 2007 mais qui restera « cantonné » principalement au mail de confirmation de gain en tournoi. Autant dire que face aux campagnes de communication mettant en scène Patrick Bruel, Sébastien Chabal, ou Bruno Solo, l’opérateur passe relativement inaperçu. Il reste obnubilé par sa place de dauphin sur son marché originel qu’il pense devoir lui revenir de droit, une sorte de sentiment de supériorité. C’est aussi la raison qui l’a incité à maintenir un logiciel en propre. Il aurait pourtant été tellement plus simple et économique de s’adosser à une plateforme existante, mais Partouche n’a besoin de personne et veut tirer le maximum de revenus quand il sera hégémonique. Las, cela n’arrivera jamais et le logiciel est loin de faire l’unanimité auprès des utilisateurs.
Patrick Partouche n’a également pas su voir l’aspect communautaire extrêmement présent autour du poker en ligne. Dans les premiers mois du nouveau marché, le rôle des communautés et des forums est essentiel. Party Poker est très proche de PokerStrategy, Winamax a développé son propre forum, et Pokerstars lui dispute la primauté de Clubpoker. En refusant inlassablement de travailler une offre d’affiliation, le groupe se coupe de ces relais de croissance et de visibilité. En trois ans, il n’apparaît même pas dans la liste des salles de poker en ligne de PokerStrategy ou Poker Académie, qui pourtant intègrent encore aujourd’hui des rooms aussi prestigieuses qu’actives comme 888.com, Sajoo ou Winga Poker. Le changement de cette politique, en 2012, ne permettra pas de retourner cette situation, le niveau de rémunération proposé alors par l’opérateur étant trop peu incitatif.


Le seul choix qui se révèle gagnant est à relever dans le lien que Partouche propose entre le live et l’online. Le lancement du Partouche Poker Tour est un succès indéniable aux répercussions internationales et les étapes Partouche Poker  Deepstack font le plein. Une fois encore, le groupe réussira à anéantir  tout ce travail en un seul weekend. A l’occasion du PPT en Septembre 2012, la communauté poker se retrouve en effervescence pour une sombre histoire de prizepool garanti de cinq millions d’euros. Patrick Partouche lui-même, montera au créneau pour se faire bluff catch pour ce qui reste l’une des pires communications dans le monde du poker, voire même au-delà. Plutôt que faire profil bas, il en fera une puérile question d’honneur, se sentant traité de voyou et de voleur, en annonçant à la surprise générale la fin du PPT. Comme un enfant qui fait un caprice. Pourtant il y a peu de chances que la décision ait été prise sur un coup de tête, Patrick Partouche n’étant pas le seul décisionnaire. Et surtout, cette annonce tombe au moment où l’ISPT prend forme, avec à sa tête un membre de la famille, Prosper Masquelier. Et voilà le Groupe Partouche embarqué dans une aventure périlleuse en lieu et place d’un évènement connu et reconnu internationalement.

Quelques mois plus tard, le Groupe se retrouve au centre de deux affaires de triche d’envergure [ndlr : la finale du PPT 2009 et le scandale des membres bénéficiant de largesse pour jouer sur le site]. Cette fois, il change de tactique et se terre dans son mutisme, passant d’une communication mal maîtrisée à plus aucune communication. Le résultat est le même : la crédibilité de l’entreprise et de ses dirigeants est réduite à néant.
Patrick Partouche reste marqué par ce manque de reconnaissance, cette fronde qu’il a néanmoins largement contribué à entretenir. A l’occasion de la fermeture de sa room, il opte une nouvelle fois pour une communication à la limite de l’enfantillage. Et son au revoir résonne comme autant d’erreurs accumulées, en substance : « Le Groupe Partouche a tout essayé pour le poker, mais vous ne nous avez jamais aimé. » Aucune autocritique, remise en question ne ressort de son message, juste le sentiment d’être un incompris qui a le monde contre vous. Finalement, le fil rouge de la communication chez Partouche se résume en un seul mot : ratage. Qu’il se taise, parle peu ou parle beaucoup, Patrick Partouche engendre une catastrophe. Pourtant les arguments qu'il avance pour expliquer cette fermeture ont le mérite de ne pas se cacher derrière la sempiternelle fiscalité que le moindre business plan est tout de même sensé avoir analysé avant de se lancer sur le marché : il est évident que les leaders du marché, Pokerstars et Winamax, ont profité de leur activité illégale avant 2010 et d’un dumping acharné lors de l’ouverture du marché online pour « s’acheter » plus de 70% du marché et pouvoir se rattraper par la suite. Plus qu’un reproche, Patrick Partouche est surtout amer et frustré de ne pas avoir su faire aussi bien qu'eux.
Quant aux joueurs qui se délectent de l’échec de l’homme et du Groupe, ils ne comprennent même pas que cette disparition remet en cause une partie de l’écosystème. Les rares joueurs de tournoi avertis par exemple trouvaient chez l’opérateur une des grilles les plus rentables du .fr. Qu’adviendra-t-il si Barrière fait de même, suivi de près par Ongame dès que Bwin Party aura enfin trouvé un informaticien digne de ce nom pour transférer la liquidité sur Party Gaming ? Ils joueront un Main Event à 5€ ou devront raker deux fois plus pour obtenir le même statut Supernova qu’actuellement.
Ne pas aimer l’homme, le style, le discours, c’est une chose. Mais ne pas comprendre que la diversité de plateformes et d’opérateurs actifs en France est un des rares derniers avantages qu’il nous reste, en est une autre. Le meilleur exemple : le Groupe Partouche, qui incite ses joueurs à migrer sur MyPok, opérateur dans le giron d’un groupe également propriétaire du Casino de Gujan Mestras et dirigée par Frédérique Ruggieri. Celle-là même qui déposait plainte en Décembre 2008 pour  ‘distorsion de concurrence’ contre le Groupe Partouche et sa nouvelle salle de poker en ligne...

Au poker, l'intérêt financier doit toujours primer sur l'égo et les sentiments. Exemple que les joueurs devraient méditer et surtout suivre. 

soxav
                                                                                                                                                                 
                                                                                                                                                              

7 commentaires:

  1. J'ai du mal à comprendre que des articles aussi documentés et informatifs que les tiens ne rencontrent pas plus d'échos et de commentaires de la part des blogueurs ou lecteurs.
    Franchement encore une fois well done

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    1. oui je découvre ton article par le bias de sam.
      1 vrai article digne d'un vrai "reporter" bien argumenté et il est vrai que la fin de partouche naugure rien de bon pour la suite du .fr

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  2. Hop blog ajouté à ma blogroll :-)

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  3. Merci à lessims38 de m'avoir fait découvrir ton blog. Hop dans ma blog roll

    article parfaitement écrit, documenté voire trés au desus de ce que peut faire une soit disant presse spécialisée

    nice one

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  4. Toujours aussi plaisant de te lire !

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