Impossible de passer outre l’évènement de ce mois de mai, et
la fermeture annoncée d’une nouvelle room. Et pas n’importe laquelle :
Partouche. Au-delà de l’information d’un énième abandon sur le marché, ce sont
surtout les réactions de joueurs qui
interpellent sur les forums et les blogs, tant elles montrent à quel point ils
ne comprennent ni le marché ni les effets néfastes que cela impliquera
nécessairement pour leur jeu à court et moyen terme, même s’ils n’étaient pas
clients partouche.fr . Il faut dire que Patrick Partouche a fait preuve ces dernières
années d’un indéniable talent à faire les mauvais choix. Stratégie, marketing
ou communication, son groupe a pratiquement tout loupé !
Patrick Partouche stigmatise sur sa personne la rancœur de
bon nombre de joueurs. A commencer par le cloisonnement du marché français dont
on lui prête une bonne responsabilité. Car Patrick Partouche s’est battu comme
un lion pour une offre légale dans notre pays, et surtout pour permettre à son
entreprise d’y avoir la part qu’il juge mériter. Le groupe avait commencé par
signer un partenariat au début des années 2000 avec Poker770, basé au Bélize
(Amérique Centrale) qui valut à PP une condamnation à 12 mois avec sursis en
2007 (finalement relaxé par la Cour de Cassation en 2009). En 2006, c’est le
groupe qui s’attaquait à l’état français auprès de la cour Européenne arguant
de l’illégalité du monopole de PMU et Française des Jeux. En octobre 2008, n’obtenant
pas gain de cause pour ses revendications sur le marché online, Partouche
Interactive Gibraltar Limited voit le jour sous couvert de Play Money pour les
joueurs français, qui, moins de deux mois plus tard, accèdent au jeu en Réel à
l’instar des milliers de sites en .com qui inondent le marché hexagonal.
Tickets live, gains à retirer en casino du groupe, la passerelle live/online
vit ses premières heures. Au-delà de la personnalité de Patrick Partouche, du
côté sulfureux des casinos, le groupe tente juste de naviguer entre une
conjoncture défavorable pour les casinos (Contrôle d’identité obligatoire, interdiction de fumer
dans les casinos, crise bancaire …), un état français peu pressé qui pense à l’époque
calmer les « ardeurs casinotières » au travers de mesures stériles
(organisation de jeux hors de leurs casinos) et une concurrence qu’il juge
déloyale de sites illégaux sur le territoire.
Il court donc plusieurs lièvres à la fois, au travers d’un
lobbying actif auprès du gouvernement
Fillon en faveur d’un marché fermé où il se voit occuper la même place
prépondérante que dans celui des casinos, tout en roulant ses interlocuteurs
dans la farine en lançant l’offre illégale qu’il dénigre tant.
Il fermera finalement
son site quelques mois avant la date fatidique pour montrer patte blanche en
vue de l’obtention d’une licence. Mais
il est déjà trop tard : la marque Partouche ne s’est pas vraiment implantée
comme incontournable et n’a pas la même aura que les Winamax, Pokerstars et
autres Bwin. Enfin, sa clientèle habituelle de casinos n’est pas franchement
celle qui vient le plus naturellement jouer sur un ordinateur. Patrick
Partouche met alors tout son poids dans la bataille pour limiter l’ouverture du
poker en ligne à un minimum d’acteurs. Il semble avoir naïvement cru qu’il pourrait
faire interdire l’accès au marché aux sites précédemment illégaux (parmi lesquels ... le sien !). Il pense qu’une pirouette suffira, en
privilégiant les acteurs casinotiers (comme ce sera le cas pour l’ouverture du
marché belge où les opérateurs online doivent être adossés à un opérateur
physique). Et devra se faire une raison devant les lobbyings de ses
adversaires, entre des mastodontes mondiaux (PS, Full Tilt, Party Poker, …) et
un ogre français qui a bien mieux construit son image et sa stratégie. En juin
2010, le site de poker en ligne Partouche n’est juste qu’un petit site parmi tant d’autres.
Dans ce contexte, les dirigeants de Partouche vont accumuler
de nouvelles erreurs stratégiques. Sur le plan de l'image notamment,
avec un Eric Cantona sous contrat depuis 2007 mais qui restera « cantonné »
principalement au mail de confirmation de gain en tournoi. Autant dire que face
aux campagnes de communication mettant en scène Patrick Bruel, Sébastien
Chabal, ou Bruno Solo, l’opérateur passe relativement inaperçu. Il reste
obnubilé par sa place de dauphin sur son marché originel qu’il pense devoir lui
revenir de droit, une sorte de sentiment de supériorité. C’est aussi la raison
qui l’a incité à maintenir un logiciel en propre. Il aurait pourtant été
tellement plus simple et économique de s’adosser à une plateforme existante,
mais Partouche n’a besoin de personne et veut tirer le maximum de revenus quand
il sera hégémonique. Las, cela n’arrivera jamais et le logiciel est loin de
faire l’unanimité auprès des utilisateurs.
Patrick Partouche n’a également pas su voir l’aspect communautaire
extrêmement présent autour du poker en ligne. Dans les premiers mois du nouveau marché, le rôle
des communautés et des forums est essentiel. Party Poker est très proche de
PokerStrategy, Winamax a développé son propre forum, et Pokerstars lui dispute
la primauté de Clubpoker. En refusant inlassablement de travailler une offre d’affiliation,
le groupe se coupe de ces relais de croissance et de visibilité. En trois ans,
il n’apparaît même pas dans la liste des salles de poker en ligne de PokerStrategy
ou Poker Académie, qui pourtant intègrent encore aujourd’hui des rooms aussi
prestigieuses qu’actives comme 888.com, Sajoo ou Winga Poker. Le changement de
cette politique, en 2012, ne permettra pas de retourner cette situation, le
niveau de rémunération proposé alors par l’opérateur étant trop peu incitatif.
Le seul choix qui se révèle gagnant est à relever dans le
lien que Partouche propose entre le live et l’online. Le lancement du Partouche
Poker Tour est un succès indéniable aux répercussions internationales et les
étapes Partouche Poker Deepstack font le
plein. Une fois encore, le groupe réussira à anéantir tout ce travail en un seul weekend. A l’occasion
du PPT en Septembre 2012, la communauté poker se retrouve en effervescence pour
une sombre histoire de prizepool garanti de cinq millions d’euros. Patrick Partouche
lui-même, montera au créneau pour se faire bluff catch pour ce qui reste l’une
des pires communications dans le monde du poker, voire même au-delà. Plutôt que faire profil bas, il en fera une puérile question d’honneur, se sentant traité
de voyou et de voleur, en annonçant à la surprise générale la fin du PPT. Comme
un enfant qui fait un caprice. Pourtant il y a peu de chances que la décision ait
été prise sur un coup de tête, Patrick Partouche n’étant pas le seul
décisionnaire. Et surtout, cette annonce tombe au moment où l’ISPT prend forme,
avec à sa tête un membre de la famille, Prosper Masquelier. Et voilà le Groupe Partouche
embarqué dans une aventure périlleuse en lieu et place d’un évènement connu et
reconnu internationalement.
Quelques mois plus tard, le Groupe se retrouve au centre de
deux affaires de triche d’envergure [ndlr : la finale du PPT 2009 et le
scandale des membres bénéficiant de largesse pour jouer sur le site]. Cette
fois, il change de tactique et se terre dans son mutisme, passant d’une
communication mal maîtrisée à plus aucune communication. Le résultat est le
même : la crédibilité de l’entreprise et de ses dirigeants est réduite à
néant.
Patrick Partouche reste marqué par ce manque de reconnaissance,
cette fronde qu’il a néanmoins largement contribué à entretenir. A l’occasion
de la fermeture de sa room, il opte une nouvelle fois pour une communication à
la limite de l’enfantillage. Et son au revoir résonne comme autant d’erreurs
accumulées, en substance : « Le Groupe Partouche a tout essayé pour
le poker, mais vous ne nous avez jamais aimé. » Aucune autocritique, remise
en question ne ressort de son message, juste le sentiment d’être un incompris
qui a le monde contre vous. Finalement, le fil rouge de la communication chez
Partouche se résume en un seul mot : ratage. Qu’il se taise, parle peu ou
parle beaucoup, Patrick Partouche engendre une catastrophe. Pourtant les
arguments qu'il avance pour expliquer cette fermeture ont le mérite de ne pas se cacher derrière la sempiternelle
fiscalité que le moindre business plan est tout de même sensé avoir analysé
avant de se lancer sur le marché : il est évident que les leaders du
marché, Pokerstars et Winamax, ont profité de leur activité illégale avant 2010
et d’un dumping acharné lors de l’ouverture du marché online pour « s’acheter »
plus de 70% du marché et pouvoir se rattraper par la suite. Plus qu’un
reproche, Patrick Partouche est surtout amer et frustré de ne pas avoir su faire aussi bien qu'eux.
Quant aux joueurs qui se délectent de l’échec de l’homme et
du Groupe, ils ne comprennent même pas que cette disparition remet en cause une
partie de l’écosystème. Les rares joueurs de tournoi avertis par exemple
trouvaient chez l’opérateur une des grilles les plus rentables du .fr. Qu’adviendra-t-il
si Barrière fait de même, suivi de près par Ongame dès que Bwin Party aura enfin trouvé un informaticien digne de ce nom pour transférer la liquidité sur Party
Gaming ? Ils joueront un Main Event à 5€ ou devront raker deux fois plus
pour obtenir le même statut Supernova qu’actuellement.
Ne pas aimer l’homme, le style, le discours, c’est une
chose. Mais ne pas comprendre que la diversité de plateformes et d’opérateurs actifs
en France est un des rares derniers avantages qu’il nous reste, en est une
autre. Le meilleur exemple : le Groupe Partouche, qui incite ses joueurs à
migrer sur MyPok, opérateur dans le giron d’un groupe également propriétaire du
Casino de Gujan Mestras et dirigée par Frédérique Ruggieri. Celle-là même qui
déposait plainte en Décembre 2008 pour ‘distorsion
de concurrence’ contre le Groupe Partouche et sa nouvelle salle de poker en
ligne...
Au poker, l'intérêt financier doit toujours primer sur l'égo et les sentiments. Exemple que les joueurs devraient méditer et surtout suivre.
soxav
Nice post l'artiste !
RépondreSupprimerJ'ai du mal à comprendre que des articles aussi documentés et informatifs que les tiens ne rencontrent pas plus d'échos et de commentaires de la part des blogueurs ou lecteurs.
RépondreSupprimerFranchement encore une fois well done
oui je découvre ton article par le bias de sam.
Supprimer1 vrai article digne d'un vrai "reporter" bien argumenté et il est vrai que la fin de partouche naugure rien de bon pour la suite du .fr
Hop blog ajouté à ma blogroll :-)
RépondreSupprimerMerci à lessims38 de m'avoir fait découvrir ton blog. Hop dans ma blog roll
RépondreSupprimerarticle parfaitement écrit, documenté voire trés au desus de ce que peut faire une soit disant presse spécialisée
nice one
Toujours aussi plaisant de te lire !
RépondreSupprimerexcellent article !
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