Responsable poker pour ce
Groupement d’Intérêt Economique (GIE) qui regroupe 50 sociétés de courses,
Stéphane Auffret, Responsable de la branche poker depuis 2010 a accepté de me
recevoir pour nous dévoiler la vision de son entreprise sur le marché du poker
en ligne.
Il baigne dans ce marché du jeu depuis 2001, année où il intègre l’entreprise pour prendre la direction des Etudes Marketing et de la Veille concurrentielle après avoir fait ses armes chez TNS Sofres.
Il baigne dans ce marché du jeu depuis 2001, année où il intègre l’entreprise pour prendre la direction des Etudes Marketing et de la Veille concurrentielle après avoir fait ses armes chez TNS Sofres.
soxav : Comment fait-on passer le PMU du turf au bluff ?
Stéphane AUFFRET :
Pendant 9 ans, j’ai été en charge des
études marketing et de la veille concurrentielle au PMU. Une de mes missions
consistait donc à surveiller le marché des jeux on line sur les 3 segments
majeurs hors casino à savoir les paris sportifs, les paris hippiques et le
poker. L’objectif était de produire de l’information sur ces différents
segments (forces en présence, stratégie marketing et de communication,
techniques de fidélisation et de recrutement…) car nous pensions que
l’ouverture du marché des jeux on line était plus que probable à terme et que
dans ce contexte notre entreprise ne pourrait rester mono-activité. Une fois
que cette ouverture a été confirmée, ma mission consistait à fournir tous les
éléments nécessaires à la prise de décision d’y aller ou pas : évaluation
du marché français, stratégie d’entrée pour le PMU, sélection des partenaires
potentiels, business plan…
Mais
autant l’extension vers les paris sportifs s’est imposée assez naturellement et
rapidement autant pour le poker des questions de cohérence, de légitimité et
d’image se sont posées car l’image du poker reste encore très clivée en
fonction de l’âge. Notre Président a convaincu le Board de la nécessité d’y
aller avec une démarche défensive dans un premier temps.
En
effet, l’ambition du PMU est d’être le leader du pari en ligne
multisport et multicanal. Disposer d’une offre globale permettant d’atteindre
cet objectif plus facilement et d’éviter que nos clients aillent s’intéresser
au poker chez d’autres opérateurs faisant partie de notre stratégie, le poker
est apparu comme une bonne activité de complément. Une fois cette décision
prise, il ne restait qu’à choisir le partenaire et être prêt le premier jour de
l’ouverture du marché pour créer un effet de surprise.
soxav : Les résultats décevants des paris sportifs, malgré
notamment la Coupe du Monde du Football en Afrique du Sud, ont-ils ouvert une brèche
plus grande au poker ?
S. A. : On dit
que le marché du pari sportif est décevant, mais il ne l’est pas pour tout le
monde. Il y a des acteurs qui gagnent des parts de marché, et des acteurs qui
dégringolent. Nous faisons partie des acteurs qui gagnons des parts de marché
dans les paris sportifs (ndlr : x2 en 2011). Certes il y a une fiscalité et un cadre difficiles pour rentabiliser
l’activité. Mais très vite, les chiffres sont au rendez-vous, au-delà même de
nos espérances dans un premier temps. Notre président, Philippe GERMOND, prend acte
de ce départ de trois-quatre mois significatifs, et donc nous demande d’évaluer
le déploiement d’une stratégie un peu plus offensive. On leur avait promis que
le marché allait être costaud, et bien c’était le cas ! Le poker s’est
imposé alors de lui-même, pas par comparaison avec les autres segments du
marché.
C’est à partir d’octobre 2010 que l’on a commencé à franchir une
première étape : on communique plus, la Team Poker est créée. Et puis le
premier semestre de l’année 2011 se passe, les résultats sont encore au
rendez-vous. On nous demande alors en avril 2011 d’envisager un plan plus
soutenu d’investissement et de communication. Nous l’avons fait et à partir de
Septembre 2011, nous avons commencé à communiquer en télé, avec un plan média
hyper ciblé.
En résumé, nous avons de l’ambition mais PMU ne sera jamais un pure
player, on ne va jamais se tromper, se fourvoyer là-dedans. En revanche nous
avons de vraies ambitions pour PMU Poker : s’installer durablement comme
premier des généralistes, asseoir notre part de marché actuelle et la
développer avec un objectif de doublement dans les 5 ans qui viennent.
soxav : Pourquoi et comment monte-t-on une Team pro ?
S. A. : La Team
Pro est un instrument de visibilité, de notoriété et de légitimité dans le
milieu du poker et le PMU a besoin de cette légitimité. Nous avons une
clientèle qui comporte des jeunes, mais la majorité de nos clients ont entre 35
et 49 ans. Il était donc primordial de ne pas lui donner un profil trop décalé
de joueurs. Notre clientèle doit pouvoir s’identifier à des personnes de la
même tranche d’âge, ayant réussi leurs vies avant le poker. Il nous fallait
d’abord quelqu’un de très connu dans le milieu du poker, doté d’un fort
charisme. Guillaume Darcourt correspond parfaitement, il sait attirer la
lumière. Il nous fallait aussi des joueurs qui puissent faire le pan avec les
activités hippique et sportive parce que nous travaillons en cross-sell sur des
gens qui sont multi activités. Donc quelqu’un qui puisse parler turf et poker,
quelqu’un qui puisse parler sport et poker. Résultat : Jean-Philippe Rohr,
ancien international et médaillé d’or et Philippe Ktorza, ancien turfiste et
propriétaire de chevaux à Vincennes. Et enfin, la touche féminine pour
équilibrer tout ça [ndlr : Rebecca Gerin]. Cette équipe s’est construite autour de ces valeurs-là, de ce positionnement-là.
Mais, il nous fallait aussi représenter la communauté online des jeunes
grinders qui arrivent sur PMU au fur et à mesure de nos communications et du
développement de nouvelles techniques comme l’affiliation. Le Team s’est
agrandie avec Emile Petit, qui a une aura très forte dans la communauté des
joueurs online et est en plus un de nos clients. Clément ‘OhMyGuru’ Beauvois avait,
lui, eu un certain nombre de résultats sur des tournois online, même si ce
n’était pas forcément sur PMU.fr. Ils sont l’image du joueur online parce
qu’ils sont en permanence sur la salle. Nos livetards, certes, jouent aussi et
animent, mais ils ont un circuit de tournois physiques qui leur prend beaucoup
de temps et ne leur permet pas d’être tous les soirs sur la room.
soxav : Le marché du poker est très dynamique mais la
fiscalité fait grincer les dents des opérateurs, tout comme des joueurs récemment.
Comment défend-on un modèle économique
viable auprès de l’institution politique ?
S. A. : Déjà, nous n’avons en aucun cas un privilège en
étant ancien monopole, au contraire puisque nous payons la TVA contrairement à
d’autres opérateurs. Personne ne gagne d’argent actuellement, y compris le PMU,
ceux qui disent le contraire font de la communication. Il faudrait certainement
revoir et assouplir cette fiscalité, mais ne faisons pas de plan sur la comète.
En revanche, optimiser les dépenses marketing, les dépenses de communication
média, travailler le retour sur investissement, c’est aussi fait pour
travailler la rentabilité. Et à court terme, ce n’est absolument pas la
fiscalité qui fera que les entreprises deviennent rentables du jour au
lendemain, mais plutôt l’équilibre de leurs dépenses marketing, quand elles
arrêteront de surenchérir pour prendre des positions sur le marché.. Dire
maintenant que l’on n’est pas rentable ? Il faut m’expliquer dans quel
marché de conquête pour prendre de la part de marché, c’est rentable ? Cela
n’existe pas.
La fiscalité sur les gros joueurs est également un dossier majeur. Sur
des marchés où un petit nombre de joueurs génèrent un gros revenu, notamment
chez les mastodontes du secteur, les plus affectés seront encore les acteurs
franco-français qui ne peuvent se rattraper sur les marchés internationaux. Quand
l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL) nous consulte, nous donnons notre avis, fondé
sur ce que l’on observe et ce que l’on connait du marché. Nous avons alerté sur
cette double frappe fiscale sur les
enjeux et sur les gains, sur cette forme d’incitation à l’exil, sans compter
ceux qui se sont déjà expatriés ou qui jouent sur vpn en .com, et de l’impact
sur la ressource fiscale de l’état.
soxav : Dans ce contexte, comment se positionne PMU Poker
sur l’international ?
S. A. : Sur la
question du jeu entre marchés régulés, nous y avons pensé en amont car ils vont
permettre de fusionner certainement à terme des liquidités sur les tournois.
C’est pour cela aussi que nous avons choisi Party Gaming comme partenaire car
sa stratégie était bien de pénétrer tous les marchés régulés en Europe. En Cash
Game c’est beaucoup plus compliqué, la taxe étant prélevé sur chaque pot. En
revanche, notre développement international en B to C se concentre
essentiellement sur le pari hippique. A ce stade et à courte terme, pas de développement
de PMUPOKER, ou des paris sportifs, au niveau international. Nous n’avons pas
non plus d’ambitions de proposer une offre sur le marché américain.
soxav : La technologie PartyGaming justement : quelles
vont être les incidences du rapprochement Bwin/Party ?
S. A. : Dans
notre relation contractuelle, nous avions prévu le cas d’une fusion avec
d’autres opérateurs du secteur, nous avons été consultés, leurs patrons sont
venus nous voir pour nous parler du projet, du moins au niveau de la France.
Nous avions en amont évalué une stratégie basée sur une technologie en propre,
mais le poker en ligne est un marché de volume qui nécessite une plateforme
stable, rôdée, un bon écosystème (fish, shark, grinder) et une bonne liquidité.
Sans cela, même avec le plus beau logiciel du monde, cela ne marchera pas. Se
lancer dans la construction d’un logiciel de poker sans avoir d’expérience du
poker en ligne nous paraissait être une erreur stratégique.
Cela se passe aujourd’hui plutôt très bien. En tant que premier
contributeur de ce réseau sur la France, PMU Poker a permis à PartyGaming de
pénétrer le marché français et d’y occuper tout de suite une position de taille.
Cela a contribué au choix de la nouvelle entité Bwin Party de conserver la
plateforme PartyGaming. De notre côté, il était hors de question de changer de
plateforme avec des risques de pertes
extrêmement puissants, tant l’accompagnement d’un tel changement est
extrêmement difficile.
Nous mettons aussi la pression sur notre partenaire sur le poker dit
« mobile » et bien sûr une version PMUPOKER est à l’étude. J’ai bon
espoir pour que le Q4 2012 nous permette d’annoncer cette extension d’accès au
service : smartphones, tablettes (et mac sur lequel nous ne sommes pas
présent). Surtout que nous sommes très en pointe là-dessus pour le sport et le
hippisme.
soxav : Quelle position adoptez-vous par rapport aux
communautés de joueurs ? Comment faites-vous aujourd’hui pour continuer à
recruter des joueurs, notamment depuis la limitation des bonus en janvier 2012 ?
S. A. : L’affiliation
tout d’abord avec une stratégie ciblée, sélective et fondée sur le partage de
revenus. Il y a un enjeu de valeur derrière, comme je vous l’ai dit, nous
devons compléter notre clientèle, et cette technique d’affiliation permet
d’aller travailler cette clientèle dite de regs puisqu’elle contribue à
légitimer notre marque dans l’univers des communautés, à faire vivre la
liquidité de la room. Il n’est pas question d’aller débaucher des joueurs 100%
Winamax ou Pokerstars mais si on peut gratter 20% de leurs enjeux, c’est déjà
gagné. On veut dire aux communautés que l’on existe, que nous avons des
avantages, un bon écosystème, que la liquidité du réseau va encore s’accroître,
même si nous ne faisons pas du rakeback à 65% comme d’autres sites, sur
lesquels certains joueurs sont désormais plus payés pour jouer que clients.
Sur l’offre de bienvenu, nous étions à 200€ et sommes passés à 500€
comme la totalité des opérateurs, sans répercussion sur notre volume de jeu. Ce
qu’il faut regarder, ce sont les conditions d’obtention de ces bonus, il faut
jouer en Cash Game avec un aspect anti-productif pour le nouveau joueur qui
découvre les conditions d’éligibilité. Pour le joueur de SnG / tournoi, nous
avons adossé 15€ sans condition autre que d’ouvrir un compte et renvoyer ses
papiers pour le confirmer. Ne nous mentons pas, le Cash Game est très important
économiquement, mais en même temps, il n’y a rien de pire pour l’attrition, le
fameux churn au poker qui est très élevé, car selon la clientèle, l’expérience
de jeu peut être négative.
soxav : Stéphane Auffret, merci de m’avoir reçu, et de nous
avoir fait partager la vision du marché de PMU Poker. Transmettez mes félicitations à P. Ktorza pour sa formidable performance au
WPT World Championship au Bellagio !
Cool sox ! Très intéressant. Comment tu fais pour que des gens comme ça acceptent de répondre à tes questions ? Ils le font de bonne grâce car ça leur fait de la pub ?
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