Deux ans. Il aura fallu deux ans seulement pour que le
marché du poker français arrive à maturité. L’été 2012 marque une sorte de « Black
Summer » avec une cascade d’annonces à quelques semaines, voire quelques
jours, d’intervalle. Cocktail de retraits, abandons et pertes abyssales à la
carte pour les clients.
Tout commence mi-juin lorsque Betclic Everest Group (BEG)
annonce 90 millions d’euros de pertes pour un CA global de 300 millions, dont
40% en France. La faute principalement à des amortissements d’après les dirigeants
qui voient en la nouvelle réorganisation du groupe la fin du tunnel. Même
optimisme chez LB Poker, qui opère Barrière Poker, pour 2011-2012. La raison ?
20 mois d’existence et près de 45 millions de pertes au compteur pour un CA généré
de … 4 millions d’euros. Il faut dire que chacun d’eux a son puits-sans-fond Qatari
à lui : BEG appartient à 50% à la Société des Bains de Mer, contrôlée par l’Etat
monégasque, tandis que Barrière s’appuie sur une Française des Jeux propriété
de l’Etat français. A la santé du contribuable français !
Passé totalement inaperçue quelques jours plus tard, l’annonce de Shuffle Master de retirer son offre de reprise du réseau Ongame se justifie sans surprise par
une perspective trop faible en termes de prospects, un investissement trop
important et des incertitudes tant sur le marché européen en général que sur la
légalisation et le déploiement du poker en ligne aux Etats-Unis.
Heureusement, on apprenait une semaine plus tard que les
dirigeants de Zynga Poker se seraient rendus à Stockholm, où est basé le siège
d’Ongame, en vue d’ouvrir des négociations. Nous voilà rassurés …
Pendant ce temps, l’ARJEL veille. Et organise une étude « sur les joueurs
en ligne, destinée à mieux connaître la sociologie et le comportement des
joueurs sur Internet ».
Juillet s’ouvre sur un coup de tonnerre. Iliad Gaming, maison-mère de Chilipoker et filiale de jeux et paris en ligne de Free, décide de se
séparer de cette activité dont « les
pertes sont restées raisonnables mais sans espace économique » d’après
son directeur financier Thomas Reynaud au journal La Tribune. Il faut dire que
le groupe a d’autres priorités depuis le lancement de son offre de téléphonie
mobile. Direction Turbopoker repris par Itechsoft pour les joueurs. La semaine
suivante, c’est au tour de Winga Poker de jeter l’éponge en raison d’un « contexte concurrentiel et fiscal qui
ne permet pas de pérenniser l’entreprise ». Heureusement, Les Echos
font part de la volonté de Genybet de se lancer à son tour dans l’aventure
poker. Nous voilà rassurés …
Pendant ce temps, l’ARJEL veille. Et déclare que « s’agissant de la marge de la fiscalité, c’est
aux opérateurs de veiller à l’attractivité de leur offre et de leur offre
commerciale à un périmètre fiscal », d’après son président Jean-Claude
Vilotte.
Les nouvelles s’enchainent décidément à un rythme hebdomadaire puisque
cette semaine c’est sur Microgaming que se trouve l’actualité : MyPok etPokerXtrem vont fusionner sous la marque de la première citée à compter du 31
Juillet 2012. Manque d’investissement de 888, la locomotive supposée de cette
plateforme, et de Microgaming, nombre de rooms insuffisant pour augmenter les
liquidités du réseau, selon Georges Djen, directeur de PokerXTrem.
Soit, mais
cela ne doit pas cacher des communications inefficaces, des erreurs marketing
indéniables comme s’il suffisait d’un Joey Star ou d’un Cyril Hanouna pour
rééditer l’aventure Winamax, et des politiques de recrutement et d’affiliation inadaptées.
Cela mène les deux entreprises au constat que leur seule option pour survivre
est de diminuer les coûts, mais cette fusion ne saurait avoir d’impact sur la
liquidité du réseau sans un plan d’actions d'envergure, et non pas sur
un discours d’opérateur différent, avec une réelle valeur ajoutée, blablabla.
Le même discours que nous ont servi toutes ces rooms alternatives lors de leurs
lancements.
Dernière preuve en date, PokerLeaders vient d’annoncer le report de
son lancement à une date « indéfinie », arguant d’un « prestataire essentiel rompant de manière
unilatérale le contrat signé avec eux » et le désormais fameux « ouvrir juste
pour la satisfaction d’ouvrir un ixième site de poker sans avoir l’assurance de
pouvoir proposer quelque chose de différent n’était pas notre ambition. » A l’image du Groupe Tranchant en
avril, les opérateurs ferment avant même d’avoir ouvert !
Sans compter les rumeurs d’un site important qui pourrait se
retirer du marché français confirmées ce 23 juillet par l'envoi d'un mail laconique de titan.fr à ses clients annonçant que "l'opérateur fermera définitivement ses portes le 30 juillet 2012", ou encore de l’accord entre Pokerstars et le DOJ américain
sur la reprise de FullTiltPoker qui serait dans l’impasse. Heureusement, l’ISPT,
fort de ses 2300 inscrits à date, a choisi un ambassadeur de marque en la
personne de Moundir et Bank Of Poker a enfin lancé, trois mois après, son
premier véritable tourno. Qui a planté dès la première main. Le marché reste
dynamique, nous voilà rassurés ...
Pendant ce temps, l’ARJEL veille. Et homologue des logiciels de paris hippiques (PMU) et sportifs (FdJ, Betclic), des transferts de noms (Iliad vers Itechsoft), une abrogation de licence (Groupe Tranchant, demandée en avril). Belle réactivité.
En plein milieu des WSOP, le monde du poker a accueilli ces nouvelles sans grande réaction, ne s’intéressant vraiment qu’à la seule fermeture d’un cercle de jeux clandestin du fait de la présence de têtes célèbres impliquées. L’ARJEL, elle, se contente d’entériner les décisions des différents opérateurs, et les joueurs oscillent entre désintérêt total et ironie pour des rooms qu’ils dénigrent, considérant que cela va recentrer les joueurs de ces rooms et leurs bankrolls sur un nombre plus restreint d’opérateurs, offrant ainsi des liquidités plus importantes pour les tables de Cash Game et des prizepools de tournois encore plus gros.
Cette vision est néanmoins très réductrice et surtout très
optimiste. Les joueurs de iPoker (Chilipoker, Turbopoker, Titan) et Microgaming
(Mypok, PokerXTrem) sont pour la plupart déjà tous inscrits sur les sites
leaders du marché, ils ne créeront donc pas un apport. En outre, plus le nombre
de site diminue, plus la visibilité du poker, via les communications des
opérateurs, sera réduite. Les joueurs pro à la recherche de sponsor n’auront,
eux, quasiment plus aucune chance d’arborer un sticker magique synonyme de
tournois internationaux. Car les leaders du marché n’auront plus besoin d’engager
des budgets conséquents pour attirer et fidéliser les joueurs, surtout à un
moment où la viabilité économique rime avec réduction des coûts de leur propre
aveu, sur un marché où la fiscalité rend les marges trop étroites.
soxav
nice post
RépondreSupprimerje l'avais pas vu non plus, good job !
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