jeudi 23 août 2012

LE JOURNALISTE ET LE POKER : Fable des temps modernes


Une jolie jeune fille avare en tissu, un gros titre avec « JEU » écrit en taille 80, et vous avez la couverture qu’il faut pour aguicher le chaland. L’été est plus propice aux régimes en tout genre, mais quand on est L’Expansion, journal économique, la déontologie nécessite d’aller aux fonds des choses. Jeux, sexe, alcool, drogue, tout y passe. A l’image de son poids sur le marché des jeux en France, le poker se taille une bonne part de cet article. 

Il faut tout d’abord trouver un titre accrocheur. Le poker est un jeu sulfureux, alors prenons le cliché « Des jeux en ligne pas si nets ». Cela donne la part belle à l’ARJEL et son bras armé, la Direction des enquêtes et du Contrôle (DEC), d’expliquer la traque incessante des centaines de sites illégaux. On leur fait un joli encart : « En deux ans d’activité, plus de 1000 aigrefins », « déjà 2500 sites sous surveillance », ou encore « dénicher l’adresse de l’opérateur, souvent exotique, et lui envoyer une mise en demeure dans sa langue : un travail fastidieux ». On saupoudre ensuite de quelques chiffres clés, parce qu’un marché de 10 milliards d’euros, c’est tape-à-l’œil, et 307 millions de recettes pour l’état, ça fait tout de même une somme !


Sur le fond, dans un subtil mélange de poker et de paris hippiques, tout tourne autour de Pokerstars, Winamax et PMU qui seraient les grands gagnants de ce nouveau marché. Pour les paris sportifs, c’est carrément la Bérézina, avec en point d’orgue le directeur de la régulation de Bwin Party qui confie avoir fait le pari d’une évolution de la règlementation. Bien vu ! Car ce que l’on retient de cet article, c’est bien l’imposition. La taxation n’est pas adaptée car basée sur les mises des joueurs et pas sur le Produit Brut des Jeux, et elle incite les joueurs à se tourner vers l’illégalité. Pour combattre cette dernière, rien de tel que l’ouverture de l’Omaha cinq cartes et du Deuce To Seven Triple pour « maintenir une offre dynamique afin d’éviter la fuite des joueurs vers les sites illégaux » selon Jean-Claude Vilotte, Monsieur ARJEL.
Ô toi, joueur de poker, caché au fond ton appartement aux volets fermés, la capuche sur la tête et les lunettes sur les yeux pour ne pas être reconnu chez toi, tu sais désormais pourquoi tu ne vas pas te tourner vers l’illégalité, toi,  : tu vas pouvoir jouer avec plus de cartes dans les mains … 
Étonnamment, un des commentaires importants de l’article n’est pas relevé. Il est pourtant politiquement incorrect  mais tellement révélateur de la schizophrénie de ce marché régulé :
"Les opérateurs voudraient élargir leur offre, guidés par ce bon vieux principe addictif : plus on tente le joueur, plus il mise."
On nous aurait menti ? Les sites ne sont pas les remparts contre l’addiction qui menace ? Finalement c’est un peu comme la liberté de la presse : l’article met en avant le succès de Winamax au travers de sa directrice, Canel Frichet, « confortablement installée sur la terrasse de l’hôtel particulier […] de la PME », « sourire éclatant », qui « s’est imposés face aux casinotiers et aux groupes média »  et est « rentable depuis le début de l’année ». Faut-il y voir un rapport avec la superbe pleine page de publicité qui accompagne l’article d’introduction de ce spécial été ? Le journaliste a aussi sa schizophrénie : l'article de fond ou le publi-reportage ...

  soxav

3 commentaires:

  1. ça partait trop bien avec la "jolie jeune fille"
    après ça se gâte

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  2. ça continue encore ici c'est cool ça !

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  3. Je ne commente jamais mais je suis ton blog, bon article

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